L’impôt négatif
A la révolte fiscale des Gilets Jaunes, le gouvernement a répondu en renonçant à augmenter les taxes sur le carburant. Cette prime d’activité correspond à l’impôt négatif prôné par Milton Friedman et a été, pour cette raison, applaudie par les libéraux.
A la révolte fiscale des Gilets Jaunes, le gouvernement a répondu en renonçant à augmenter les taxes sur le carburant.
Le mécontentement ne faiblissant pas, il a dans un second temps distribué environ 10 Mds€ sous forme de primes d’activité. Avant la prime était limitée aux personnes qui touchaient de 0,5 fois le smic à 1,2 fois le smic. Le plafond a été relevé, à partir du 1er janvier 2019, à 1,5 fois le smic (1 723 euros net), ce qui permet d’élargir l’aide à 1,2 million d’allocataires pour atteindre 5,6 millions de personnes, contre 3,8 millions de personnes auparavant. L’augmentation est de 90 euros et concerne les personnes au niveau du smic et devient dégressive à partir de 1,2 smic : une personne seule et sans enfant qui gagne un smic (1 204 euros net) percevait, en 2018, 148 euros de prime d’activité, elle lui rapporte désormais 241 euros.
Cette prime d’activité correspond à l’impôt négatif prôné par Milton Friedman et a été, pour cette raison, applaudie par les libéraux.
Elle présente quatre avantages conjoncturels :
- Elle permet, en augmentant le pouvoir d’achat des plus bas salaires, c’est-à-dire de ceux dont la propension à consommer est la plus élevée, d’augmenter la consommation et donc la croissance à hauteur de probablement 0,5 point : c’est bienvenu au moment où précisément cette croissance a ralenti sous l’effet conjugué d’une hausse du prix des carburants dans la première moitié de l’année 2018, d’un ralentissement de la demande externe dans le seconde partie de l’année 2018 et d’un serrage budgétaire.
- Elle accompagne favorablement la mise en œuvre de réformes structurelles (marché du travail, financement des allocations chômage, retraite) nécessaires à la hausse du niveau de croissance potentielle dans notre pays : Schröder l’avait bien compris, lui qui avait négocié auprès de Jacques Chirac un déficit allemand au-delà de la barre des 3% pour mener à bien la réforme des conditions de production en Allemagne.
- Elle ne pèse pas sur la compétitivité de l’appareil de production français France : le coût du travail n’est pas augmenté puisque la prime d’activité n’est pas financée par l’employeur ; c’est crucial puisque le retour d’une croissance durable dans notre pays implique une meilleure compétitivité, essentiellement par rapport à nos partenaires européens et notamment allemands : or le différentiel de coût du travail entre la France l’Allemagne se réduit significativement depuis quatre ans et il ne fallait surtout pas casser cette dynamique vertueuse.
- Elle ne pèse pas durablement sur la trajectoire budgétaire française puisqu’elle préexistait dans le plan à 5 ans de réduction du déficit publique, mais devait seulement venir plus tard et de manière plus étalée.
En contrepartie, l’augmentation de la prime d’activité comporte des inconvénients structurels :
- Elle fausse durablement le marché du travail : le prix du travail ne correspond plus à la rémunération exigée par celui qui loue sa force de travail, ce dernier incorporant désormais la prime d’activité dans ses calculs. L’information prix du marché devient inexacte ce qui devrait théoriquement empêcher l’ajustement du marché du travail vers son optimum à long terme. Cette déformation de l’information, c’est-à-dire de la vérité, sur le marché du travail est d’autant plus problématique qu’elle s’ajoute à celle qui préexistait sur le marché de la dette : la politique d’argent gratuit de la BCE, probablement nécessaire à court terme, favorise la rente et l’excès de dette ; en empêchant une bonne l’allocation du capital, elle réduit la croissance potentielle à long terme.
- L’importance atteinte par la prime d’activité, jusqu’à 20% du SMIC, risque de brouiller les repères de la plupart, surtout si on ajoute à la prime d’activité les autres aides (APL, ARS, ASF, Allocation familiale, prestation d’accueil du jeune enfant, RSA, ACS, bourse de collège et de lycée, chèque énergie, APA).
Les revenus de beaucoup de français ne trouvent plus leur unique origine dans le travail ou l’épargne mais dépendent de plus en plus de décisions politiques. Le risque est :
- de sortir toute une partie de la population du monde réel, c’est-à-dire du réalisme, ce qui ouvre la voie à tous les débordements politiques ;
- de faire basculer la France dans le clientélisme, le vote démocratique passant du choix pour le bien commun à la seule défense de l’intérêt particulier : les français assistés pour leurs subventions et les français taxés contre leurs impôts.
En conclusion, les mesures en faveur du pouvoir d’achat de Macron sont très utiles à court terme, mais dangereuses à long terme: C’est un peu comme un médicament qui aurait des effets secondaires.
Dès lors, le seul chemin pour notre pays est que cette prime d’activité permette la mise en œuvre de réformes structurelles qui augmentent notre potentiel de croissance, ce qui permettra, dans un deuxième temps, d’augmenter les salaires et donc de réduire ou supprimer ces allocations pour le plus grand nombre.
Mais le pari est risqué : Si ce travail courageux de réforme n’était pas mené, après la stimulation passagère de l’économie française, il ne resterait de cette prime d’activité qu’une hausse structurelle des dépenses publiques : comme la CSG qui a démarré à 0,5% et qui a été portée à plus de 17%, la prime d’activité sera alors augmentée à chaque crise … jusqu’à la faillite de l’Etat.
Hiboo pense que notre pays continuera à se réformer et évitera cet écueil. Mais quoiqu’il en soit, les sociétés cotées sont généralement internationales : contrairement au placement en Euro au sein des contrats d’assurance-vie, des actions bien sélectionnées ont l’immense avantage d’indexer l’avenir d’un patrimoine plus sur l’économie mondiale que sur l’économie française.