Point boursier (mars 2020)
Voici, exceptionnellement sous forme d'édito, le point boursier Hiboo du mois de mars 2020.
Le CAC 40 est sorti de son canal haussier moyen terme et s’est pour l’instant repris sur un support autour de 4.000 points :
S’il devait refranchir à la baisse ce support, la prochaine résistance baissière pourrait se trouver sur une oblique de soutien un peu en-dessous de 3.500, mais qui ne présente pas suffisamment de points de rappels pour pouvoir être considérée comme très fiable :
Le plus frappant cependant est la figure même de la baisse qui n’est pas comparable aux précédentes chutes de 2000 et 2008 : en effet la bourse tombe comme une pierre, quasiment sans rappels, et non pas en escalier :
Cela signifie probablement qu’on ne peut pas analyser la chute de la bourse de manière classique parce qu’elle est causée par un élément spécifique et inconnu : le confinement des populations, d’une durée prévisible de 6 à 10 semaines avec une possibilité de réactivation à l’automne dans l’éventualité d’une deuxième vague de contaminations.
Dès lors le comportement à venir de la bourse est graphiquement imprévisible : tout peut arriver et une baisse plus forte encore est possible et ce d’autant que les États-Unis, le marché directeur, et plus spécifiquement le DOW JONES, a ouvert un gap entre 19.000 et 19.600 qui pourrait être prochainement comblé :
En contrepartie, toute nouvelle significative et positive sur le plan sanitaire pourrait avoir l’effet exactement inverse et générer une hausse, cette fois en chandelle, en miroir inversé de la chute : à cet égard le Président de la société pharmaceutique suisse Novartis a déclaré que des tests sur des animaux et des premières données cliniques montrent que l'hydroxychloroquine tue le virus covid 19 et une confirmation de ces premiers essais cliniques pourrait être un déclencheur de hausse des marchés.
Au global donc, il est très difficile pour hiboo de donner des conseils boursiers à court terme et c’est pourquoi notre recommandation reste d’utiliser progressivement sa trésorerie disponible pour investir dans la baisse à moyen et long terme sur des sociétés disposant d’un bilan solide, d’avantages concurrentiels forts et idéalement d’un positionnement de leader, en somme de rester campé sur une analyse des fondamentaux à long terme des sociétés et de leur décote par rapport à leur valeur intrinsèque.
Cela dit autant l’évolution de la crise sanitaire est globalement prévisible avec une fin dans les prochaines semaines ou les prochains mois, autant ses effets secondaires pourraient être significatifs et sont, comme les marchés, difficiles à prévoir.
Il y a bien entendu des questions sur :
- la capacité pour les tissus des entreprises dans les différentes économies du monde à surmonter le choc ;
- l’évolution potentielle du comportement des consommateurs.
Mais la question la plus importante pourrait être celle des conséquences budgétaires pour les Etats de la zone euro : ils doivent tenir compte à long terme des règles de fonctionnement de la zone monétaire, et ne disposent pas en propre d’une banque centrale à même de racheter puis éventuellement d’effacer la dette publique achetée, même si la BCE « fait le job » par ses interventions maintenant massives sur les dettes publiques des Etats de la zone.
Au bout de la crise, les pays du Sud de l’Europe pourraient se retrouver avec un montant de dette significativement accru par leurs interventions pour soutenir leurs économies, alors même que leurs recettes pourraient être sévèrement impactées par la baisse de l’activité économique.
Il ne sera probablement pas acceptable alors pour l’Italie de voir sa dette monter à 140 ou 150% de son PNB ou à la France à 110 ou 120% du sien.
Pour la France spécifiquement, il apparaît aujourd’hui clairement que malgré une niveau de prélèvement obligatoire record, le plus élevé de tout l’OCDE, le financement des missions régaliennes : défense, sécurité, université, justice, santé, n’est plus correctement assuré tant par l’insuffisance de l’investissement que par la rémunération du personnel.
Autrement dit, cela signifie probablement que le maintien du modèle français impose un niveau d’endettement insoutenable en temps normal et encore plus en temps de crise et qu’il nécessite un niveau de croissance plus élevé.
Seule la croissance pourrait apporter les ressources financières dont l’Etat a aujourd’hui besoin, alors même qu’elle permettrait de réduire le chômage et donc les dépenses sociales, et ainsi à terme le poids même des prélèvements obligatoires sur l’économie.
Obtenir une croissance plus forte pourrait passer par une politique budgétaire dans un premier temps plus dispendieuse avec de grands plans pour dynamiser nos infrastructures (numériques, énergétiques) et rétablir nos services publics.
Elle nécessiterait également probablement une monnaie plus faible et mieux adaptée à l’état actuel de la compétitivité de notre économie.
Dès lors, la zone euro pourrait aujourd’hui être menacée si l’Europe ne prenait pas à son compte propre les conséquences budgétaires de la crise actuelle, soit par un effacement par la BCE des dettes achetées sur les marchés, soit par l’émission de dettes par l’Union Européenne en place des Etats.
A ce stade, l’opposition des pays du Nord, qui estiment avoir produit des efforts plus significatifs que les pays du Sud dans la gestion de leurs économies et de leurs budgets, est probable mais pas certaine tant un éclatement de l’Euro leur serait préjudiciable.
La toute récente déclaration d’Amélie de Montchalin, la secrétaire d'Etat française chargée des Affaires européennes, montre que le bras de fer est d’ores et déjà engagé : "Notre Europe, c'est celle de l'action, c'est celle de la solidarité, et si certains ne veulent pas, et bien il se posera la question de leur place et la question de ce qu'on doit faire encore à 27. C'est une question existentielle."
La déclaration du Président Macron, lors d’une de ces dernières interventions, où il parlait de ruptures pourrait aller dans le même sens.
Dans ce cadre, les obligations semblent beaucoup plus à risque à moyen et long terme que les actions, surtout s’il s’agit d’actions de groupes français mondialisés ou largement exportateurs.
Après la recommandation d’investir progressivement sa trésorerie dans la baisse sur des actions de qualité, hiboo recommande donc vivement à ses abonnés de se tenir éloignés de tout type d’investissement obligataire dans la zone euro et ce d’autant que leur rémunération ne couvre absolument pas un risque d’éclatement de l’union monétaire qui rentre maintenant dans l’échelle des probabilités même si c’est encore à ce stade à un niveau faible.
Nous resterons dans les prochains jours et dans les prochaines semaines en lien avec vous, sans vidéos (confinement oblige), mais par nos flashs pour vous accompagner du mieux que nous pourrons dans cette période particulièrement troublée et difficile à analyser.
A bientôt donc avec l’équipe hiboo !