Le nouvel âge
La part de l’industrie en France, mais également dans tous les autres pays développés n’a cessé de baisser au cours des dernières décennies. Cette situation est en voie de changer. L’industrie ne devrait pas descendre, comme l’agriculture, au niveau de seulement quelques points du PNB. Le monde occidental va se réindustrialiser.
Parallèlement, le monde émergent va continuer, ou pour certains pays comme le Maghreb, commencer à s’industrialiser.
Mais ce ne seront pas les mêmes industries.
Que se passe-t-il donc ?
Les progrès des technologies sont en voie de transformer en profondeur le paysage industriel :
1) Le moteur électrique a de bonnes chances de remplacer le moteur thermique dans les prochaines années :
Le moteur thermique est complexe : il comporte et nécessite une multitude de pièces comme les blocs moteurs, les pistons, les injecteurs, les turbos, les embrayages, les pots d’échappement etc.
Le moteur électrique est très simple et surtout il peut monter tellement haut dans les tours qu’il ne nécessite aucune boîte de vitesse.
Le moteur électrique est également beaucoup plus efficient que le moteur thermique : son rendement est d’environ 80% contre environ 30% pour le thermique, ce qui explique pour ce dernier qu’il chauffe tellement.
Le problème pour le moteur électrique réside dans le stockage de l’électricité et ce d’autant que les batteries actuelles sont très polluantes. La pile à combustible pourrait être la réponse à ce problème puisqu’elle utilise l’hydrogène pour stocker l’énergie.
Le problème du stockage sera très probablement résolu d’une manière ou d’une autre dans les prochaines années. Le moteur électrique l’emportera alors sur le thermique.
Cela signifie la fin programmée de l’avantage concurrentiel des puissances industrielles reposant sur des décennies de recherche et de pratique et sur des bassins industriels complexes regroupant des entreprises spécialisées dans la production de pièces mécaniques.
Toutes les productions de biens comportant aujourd’hui des moteurs thermiques pourront alors progressivement se déplacer vers le monde en développement. Ce dernier deviendra le lieu de production d’une industrie simple, accessible, sans barrière à l’entrée.
2) Parallèlement, les progrès réalisés dans les nanotechnologies, l’intelligence artificielle, l’utilisation et le stockage de données permettent l’émergence d’une industrie très sophistiquée et complexe.
Cette industrie sera localisée chez les puissances industrielles d’aujourd’hui : elle nécessite en effet beaucoup de capitaux et une main d’œuvre hautement qualifiée. Mais surtout elle devient hautement stratégique pour deux raisons :
- Beaucoup d’éléments technologiques avancés deviennent clé dans la compétition commerciale et la dépendance à des industriels, souvent asiatiques, pour l’approvisionnement de ces produits devient dangereuse.
- L’industrie dite 4.0 sera la clé de la compétitivité. Or elle doit se déployer dans un environnement hautement numérisé et sécurisé. En effet cette nouvelle industrie est bâtie autour de systèmes « cyberphysiques » où les usines, utilisant la robotique, la numérisation des maquettes et des processus de production et l’impression 3D, interagissent avec une intelligence artificielle analysant du big data stocké dans le cloud et se coordonnent ensuite avec d’autres usines sous-traitantes ou clientes.
On peut déjà voir les premiers signes de cette mutation. Apple a longtemps été la société « plateforme » la plus emblématique ; une société est dite plateforme lorsqu’elle conçoit et commercialise des produits, mais en sous-traite la fabrication.
Or en 2018, Apple devrait investir environ 14 Mds$ en recherche et développement, une somme gigantesque qui est égale à tous les investissements réalisés par la société en R&D de 1998 à 2011 et qui est le double du budget de 2017. Il semblerait que cette explosion du budget de recherche soit motivée par la volonté d’Apple de concevoir et produire dans ses propres usines un certain nombre d’éléments stratégiques de ses téléphones portables : des unités centrales de traitement, des processeurs graphiques, des écrans microleds, des appareillages de réalité virtuelle.
Demain l’industrie de production de masse et à base de moteurs électriques s’installera dans le monde en développement.
L’industrie hautement qualifiée et connectée s’implantera durablement dans le monde déjà industrialisé ou développé : le développement de cette industrie se fera autour et avec l’intelligence artificielle. L’intelligence artificielle est un système numérisé d’auto apprentissage : plus la masse d’informations qu’elle traite est importante, plus elle gagne en efficacité. L’avance que vont prendre les puissances aujourd’hui industrielles dans la mise en place de l’industrie 4.0 sera très difficilement rattrapable. Le monde risque de se fracturer à nouveau entre le monde cyber développé et le reste du monde.
Dans ce contexte, les sociétés exposées à la révolution électrique, comme les constructeurs automobiles, ne sont pas nécessairement menacées. La concurrence en provenance de producteurs du monde émergent sera certainement plus forte, les barrières technologiques à l’entrée sautant. Mais l’avantage concurrentiel tiré de parts de marché importantes induisant des effets d’échelles significatifs seront toujours là. Leur production de véhicules pourra cependant être plus facilement et plus globalement délocalisée, la nécessité de disposer d’un fort bassin industriel pour produire se faisant moins sentir. Le prix des voitures devrait également significativement baisser, rendant leur commercialisation plus facile dans les pays non encore développés. L’investisseur s’intéressera donc en priorité aux constructeurs qui font simultanément un effort d’investissement important tant dans ces pays que dans l’électrique : Renault est un bon exemple, la société se déployant très bien dans les émergents avec également le meilleur positionnement mondial dans le low-cost et dans l’électrique.
Mais d’une manière générale, l’investisseur à long terme privilégiera les sociétés qui auront su le plus tôt investir dans l’industrie 4.0 ou celles qui fournissent aux entreprises les outils de cette industrie : hiboo n’a pas encore identifié d’acteur industriel majeur ayant pris une avance significative dans la première catégorie, si ce n’est Pandora avec sa toute nouvelle usine en Thaïlande ultra connectée, numérisée et outillée d’imprimantes 3D. En revanche, dans la seconde catégorie, les sociétés d’excellence ne manquent pas : Reply, Dassault Systèmes, Thales pour une partie de son activité, la cybersécurité et notamment grâce à son rachat de Gemalto, Criteo pour sa forte capacité à traiter du big data. Mais également des sociétés comme Accenture ou IBM sont très en avancée dans ce mouvement : dans ses derniers résultats trimestriels, Accenture dévoile que ces activités sont celles qui connaissent, et de loin, la plus forte croissance.
hiboo s’attachera particulièrement à décrypter les stratégies industrielles des sociétés pour trouver, pour ses abonnés, les sociétés gagnantes de demain.